Longtemps relégué au second plan, le microbiote intestinal, cet écosystème dense de micro-organismes nichés dans notre tube digestif, s’impose aujourd’hui comme un acteur majeur de notre santé.
L’ensemble de la communauté scientifique s’accorde aujourd’hui à confirmer que ces milliards de bactéries jouent un rôle primordial dans l’équilibre global de notre corps : troubles intestinaux occasionnels ou chroniques, immunité fragile, douleurs régulières, inflammation chronique, éruption cutanée, tout serait lié pour partie à un déséquilibre de notre microbiote.
Et si la gestion du poids pouvait être dictée par la qualité de notre microbiote ? et si les probiotiques, permettant d’enrichir notre microbiote, pouvaient avoir un impact sur notre besoin de perte du poids ?
Son influence sur le métabolisme énergétique et la régulation des fonctions métaboliques suscite un intérêt croissant, notamment dans le contexte du syndrome métabolique, un trouble en expansion mondiale associant obésité abdominale, insulinorésistance, dyslipidémie et hypertension.
QU’EST-CE QUE LE SYNDROME MÉTABOLIQUE ?
Le Syndrome métabolique correspond à l’association de plusieurs troubles liés à la présence d’un excès de graisse à l’intérieur du ventre. Celui-ci est caractérisé par les indicateurs suivants :
- Tour de taille élevé
- Tension artérielle élevée
- Glycémie trop haute,
- Mauvais cholestérol,
- Inflammation silencieuse
Autant de troubles qui augmentent les risques cardiovasculaires.
LE MICROBIOTE INTESTINAL, CHEF D’ORCHESTRE DU MÉTABOLISME
Les liens entre microbiote intestinal et métabolisme humain sont à la fois complexes et bidirectionnels. Une altération de sa composition, ou dysbiose, est souvent corrélée à une inflammation de bas grade, une perméabilité intestinale accrue et une perturbation de l’axe intestin-cerveau, autant de facteurs qui précèdent ou accompagnent les troubles métaboliques.
Certains chercheurs (Araujo et al., 2022) n’hésitent plus à qualifier le microbiote d’« organe métabolique », en raison de son rôle dans la fermentation des fibres alimentaires dans le côlon. Ce processus produit des acides gras à chaîne courte (AGCC) comme l’acétate, le propionate et le butyrate, qui influencent la lipogenèse, la régulation glycémique, l’inflammation et la satiété.
Ces métabolites sont également capables de moduler l’expression de gènes liés au métabolisme, ce qui montre une interaction directe entre le microbiote et les tissus métaboliques. Or, les personnes atteintes de syndrome métabolique présentent souvent une diversité bactérienne réduite, une diminution des bactéries productrices de butyrate, et une surreprésentation d’espèces pro-inflammatoires.
DES SOUCHES CIBLÉES POUR UNE EFFICACITÉ CLINIQUE
Plusieurs études cliniques soutiennent l’utilisation de souches probiotiques pour améliorer les marqueurs du syndrome métabolique. Une étude randomisée contrôlée de Cicero et al. (2021) menée chez 60 patients âgés a montré qu’une supplémentation symbiotique incluant Lactobacillus plantarum (PBS067), L. acidophilus (PBS066) et L. reuteri (PBS072) pendant 60 jours réduisait significativement le tour de taille, la glycémie à jeun, l’insuline, les triglycérides, le cholestérol total et LDL, ainsi que la tension artérielle et les marqueurs inflammatoires (CRP-us, TNF-α). Ainsi, en seulement 2 mois de complémentation (et sans modification de l’alimentation), on note un effet significatif sur les marqueurs du syndrome métabolique.
UN MODE D’ACTION MULTIFACTORIEL
Les effets des probiotiques reposent sur plusieurs mécanismes complémentaires :
• Production d’AGCC (Acides Gras à Chaine Courte) agissant sur la satiété, l’inflammation et la sensibilité à l’insuline ;
• Renforcement de la barrière intestinale, limitant la translocation de composés pro-inflammatoires ;
• Modulation du système immunitaire, via la stimulation des cytokines anti-inflammatoires ;
• Régulation du métabolisme lipidique et des acides biliaires ;
• Interaction avec l’axe intestin-cerveau, influençant comportement alimentaire et stress.
Ces actions conjuguées permettent une influence durable sur l’homéostasie métabolique.
Les données actuelles plaident donc en faveur d’un rôle stratégique du microbiote intestinal et des probiotiques dans la prévention et la gestion du syndrome métabolique. Bien que la spécificité des souches soit essentielle (chaque souche n’ayant pas les mêmes effets), les bénéfices métaboliques observés renforcent la pertinence d’intégrer ces stratégies dans une approche globale de santé.
ASSOCIER PROBIOTIQUES ET HYGIÈNE DE VIE : UNE NÉCESSITÉ
Aussi performants soient-ils, les probiotiques ne remplacent pas les piliers fondamentaux d’une bonne hygiène de vie. Une alimentation riche en fibres, en polyphénols et en aliments fermentés, associée à une activité physique régulière et un sommeil de qualité, constitue un socle indispensable pour renforcer l’effet des souches probiotiques et ancrer leurs bénéfices dans le temps.
Comme le rappellent Lauw et al. (2023), « les facteurs liés à l’alimentation et au mode de vie restent des déterminants essentiels de la composition du microbiote intestinal et des résultats en matière de santé métabolique ».
En clair, les probiotiques doivent être envisagés comme des alliés dans une stratégie globale et intégrée de prévention et de gestion du syndrome métabolique.
Auteur : Marine Dodet (naturopathe scientifique)